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19/10/2011

L'opéra du samedi

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(Anna Netrebko et Ekaterina Gubanova)

J'ai été très heureuse de retrouver mon opéra du samedi, il y a quelques jours. Autrefois, mon père écoutait les retransmissions du Met à la radio, le samedi après-midi. Il écoute d'ailleurs encore l'Opéra du samedi sur Espace musique.

Mais moi, je préfère aller au cinéma Jonquière pour assister à la diffusion d'une oeuvre du répertoire en direct du Metropolitan Opera.  Pour le plaisir de m'asseoir dans un fauteuil et de me laisser emporter par le spectacle, même s'il est plus ou mois bon.

Ainsi de Anna Bolena, qui fut présenté samedi dernier. Du bel canto, certes, du Donizetti certes, mais certes pas sa meilleure oeuvre. Un livret lourd, interminable, assez peu clair sur les motifs et les intentions de ces personnages historiques. Des interprètes qui ne sont pas spécialistes du genre, et même des problèmes de son (réception, transmission?).

La diva Anna Netrebko incarnait Anne Boleyn. Elle fut interviewée par le directeur du Met Peter Gelb, avant la représentation (plutôt qu'à l'entracte), à sa demande car le rôle est exigeant, épuisant, terrible. La soprano russe l'assume parfaitement côté technique. Elle peut tout faire: aigus, graves, trilles, ornements, déplacements, gestes.  Une vraie machine à chanter... à laquelle il manque une âme, une intensité dans les passages dramatiques. (Je sais, la remarque est dure compte tenu des écueils du rôle qu'elle réussit d'ores et déjà à surmonter... Mais c'est ce que j'ai ressenti).

J'ai bien aimé le ténor Stephen Costello (avec Anna Netrebko sur la photo ci-dessous) dans le rôle de Percy, l'ancien prétendant d'Anne Boleyn, épouse d'Henri VIII d'Angleterre que celui-ci veut écarter pour pouvoir épouser sa nouvelle (et troisième sur six) flamme, Jane Seymoumetropolitan opera,anna bolena,donizetti,anna netrebko,jonquièrer. Donc le roi complote pour faire revenir Percy au royaume d'Angleterre et accuser ensuite Anne Boleyn d'adultère.

Ekaterina Gubanova (russe, tout comme Mme Netrebko), était la meileure de tous, tant au point de vue de la technique que de l'expression. Seul problème: le timbre de sa voix un peu vieillissante n'était pas particulièrement agréable à entendre.

Le baryton Ildar Abdrazakov, troisième Russe de cette distribution, était crédible dans la peau d'Henri VIII, mais m'a semblé assez faible vocalement.

Si on ajoute des décors et costumes pas vraiment inspirés, une mise en scène très conventionnelle, on obtient un spectacle couci-couça. Certainement pas le meilleur opéra produit au Met.

Mais j'ai aimé ça quand même. C'est la magie de l'Opéra du samedi au cinéma.

Depuis que je fréquente assidûment ces projections au Cinéma Jonquière, ma culture opératique s'est grandement enrichie. Avant cela, il y a quatre ans, j'avais vu assez peu d'opéras sur scène (mais plusieurs opérettes), et donc je connaissais assez peu ou pas du tout la plupart des oeuvres présentées au Metropolitan, et je ne savais rien de la plupart des interprètes. Maintenant je les connais, je sais quels sont les favoris des metteurs en scène, je les aime ou pas. Et je réalise (par les interviews et les gros plans) à quel point ce métier de chanteur d'opéra est difficile, exigeant, presque surhumain.

Bref, même quand c'est moins bon, il y a toujours des choses à apprendre, à découvrir. Et ça, c'est très bon pour mon cerveau vieillissant...

Ce plaisir que je m'offfre régulièrement embellit mes samedis après-midis. 

20/03/2011

Lucia di Lammermoor: cris et roucoulements

En février 2009, je suis allée voir Lucia di Lammermoor, l'opéra de Gaetano Donizetti monté au Metropolitan Opera et diffusé au cinéma Jonquère.

Hier, samedi 19 mars 2011, je suis retournée au même cinéma, voir le même opéra, dans la même mise en scène (de Mary Zimmerman), également en direct du Met. Une distribution et une direction musicale différentes ont donné d'autres couleurs à cette belle oeuvre.

J'avais bien aimé ma première Lucia, Anna Netrebko, et  j'ai louangé grandement sa prestation (ici).  J'avais cependant, sans oser l'avouer, l'impression qu'il lui manquait quelque chose.

Ce quelque chose, je l'ai trouvé chez Natalie Dessay, l'interprète d'hier. C'est à la fois indéfinissable et nettement perceptible: la conjonction de plusieurs éléments, talent de comédienne, agilité vocale (à la fois innée et cultivée), expérience, et surtout, croit-on comprendre,  l'immense plaisir qu'elle éprouve à faire son métier: elle va même jusqu'à improviser, ajoutant des ornements ou des déplacements non prévus. Ce plaisir jubilatoire coiffe sa prestation d'un plus qui appelle les superlatifs: éblouissante, magique, émouvante, superbe. Elle avait la voix un peu voilée lors des interviews accordées à Renée Fleming, et peut-être aussi à certains moments sur scène, mais peu importe: sa prestation est de celles qui emportent tout sur leur passage.

Ce que l'on voit sur la vidéo ci-dessus, c'est une projection sur grand écran à Times Square, en 2007, pour le lancement de la saison du Metropolitan Opera, où Natalie Dessay chantait Lucia pour une première série de représentations. Elle interprète le célèbre air de la folie, écoutée par les passants, les gens assis dehors: c'est fabuleux.

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La distribution de 2011 est  supérieure à celle de 2009, d'autant plus que le ténor Joseph Calleja, dans le rôle d'Edgardo, est un partenaire idéal pour la soprano et livre une performance également remarquable: physique séduisant, intense et émouvant, voix très musicale, pure et puissante, parfaitement à l'aise dans les acrobaties exigées par la partition.

Son dernier air, Tombe degli avi mici (Tombeau de mes ancêtres), qu'il chante avant de se donner la mort, est totalement pertinent et bouleversant (dans chaque production où l'interprète d'Edgardo n'est pas à la hauteur, cette aria paraît superflue après le grand air de la folie de Lucia).

lucia di lammermoor,metropolitan opera,natalie dessay,joseph callejaPhoto de lui ci-contre.  Et en cliquant sur l'image un peu plus haut, on peut voir et entendre son duo du début avec avec Natalie Dessay.

Le baryton Ludovic Tézier et la basse Kwangchul Youn sont très corrects dans des rôles ingrats et difficiles d'Enrico, frère de Lucia,  et du chapelain. Belle voix du ténor Matthew Plenk dans le rôle très bref d'Arturo.

Mise en scène convenue, décor singulièrement lourd et compliqué, mais peu importe, ce qui compte c'est la musique, superbement servie par le maestro Patrick Summers et les interprètes: le célèbre sextuor de l'acte II était particulièrement inspiré.

Anecdotes

J'ai vu Lucia di Lammermoor à l'Opéra de Montréal en 2001 (voir mon billet ici), et j'en conserve un souvenir étrange.lucia di lammermoor, opéra de Montréal, Mary Dunleavy, 2001, metropolitan opera,natalie dessay,joseph calleja, opéra de Montréal Le ténor et le baryton (Gran Wilson et Brian Davis) étaient plutôt mauvais, et la soprano Mary Dunleavy, très souffrante, chantait d'une voix à peine audible. Pour l'air de la folie, craignant le pire, tous les spectateurs retenaient leur souffle...

Et l'improbable s'est produit: ce filet de voix éthéré et irréel, soutenu par le son aérien de la flûte, s'élevant dans le silence le plus total, a agi comme un philtre magique sur un public totalement envoûté. Ce fut le meilleur moment de cette production plutôt médiocre. 

Par ailleurs, la neige, comme toujours à la scène, était évoquée par des petits morceaux de papier-mouchoir tombant du plafond. Or, certains d'entre eux étaient bien trop grands et ressemblaient davantage à des kleenex qu'à des flocons: gracieuseté des techniciens de la Place des Arts, qui exerçaient alors des moyens de pression.

27/02/2011

Ô malheureuse Iphigénie!

Ô malheureuse Iphigénie (chanté ci-dessus par Maria Callas): c'est la grande aria d'Iphigénie en Tauride, le magnifique opéra de Gluck présenté samedi au Cinéma Jonquière, en direct du Metropolitan Opera de New York. Parmi les éléments ayant incité les fans à remplir la salle: la présence sur scène de la mezzo-soprano Julie Boulianne, originaire de Dolbeau-Mistassini. Elle est la première de nos gloires opératiques locales à chanter au Met, et plutôt deux fois qu'une car elle incarnera prochainement Stephano dans Roméo et Juliette de Gounod (qui ne sera pas diffusé au cinéma cependant).

Elle joue le rôle très mineur (on la voit en très petit sur la photo ci-dessous) et néanmoins important de la déesse Diane: elle interprète son seul air (qui dure environ trois minutes) vers la fin , après être descendue du plafond dans des harnais dont elle se détache gracieusement. Elle a fort bien chanté, dans un registre plus élevé que mezzo m'a-t-il semblé, mais peu importe, c'était un bon moment et les gens à Jonquière l'ont applaudie.

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Pour ma part, je n'aurais manqué cet opéra pour rien au monde, parce qu'il est en français, et surtout, à cause de la musique. Musique pure, dépouillée, lumineuse, parfaitement rendue par un orchestre aux effectifs réduits, que j'ai goûtée d'un bout à l'autre. Et il y a beaucoup d'arias sublimes, Unis dès la plus tendre enfance, Dieux qui me poursuivez, et D'une image, hélas! trop chérie, entre autres.

De grosses pointures dans les rôles d'Iphigénie et de son frère Oreste: Susan Graham et Placido Domingo (qui ont chanté déjà cet opéra au Met en 2007). Le directeur du Metropolitan  s'est présenté sur scène, avant la représentation, pour demander l'indulgence du public envers les deux vedettes, qui allaient performer malgré une vilaine grippe. Ils ont vaillamment traversé tout ça, lui un peu essoufflé et incapable de chanter à pleine voix, elle à peine troublée par un léger embarras dans l'aigu: mais leur talent et leur expérience ont largement compensé ces difficultés temporaires et c'était beau de les voir et de les entendre.

J'ai découvert l'excellent ténor américain Paul Groves (spécialiste du répertoire français, que l'on voit sur la photo ci-dessous avec Graham et Domingo) dans le rôle de Pylade:  timbre clair, voix souple, manifestement à l'aise dans ce type de musique. J'ai adoré l'entendre chanter.

Seul bémol de la distribution, Gordon Hawkins, dans le rôle (heureusement assez bref) de Thoas, roi des Scythes: une véritable catastrophe, très mauvais chanteur et acteur: n'importe quel des choristes présents sur scène aurait sans doute mieux fait!).

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La scénographie s'inspire de la peinture hollandaise, ou aurait dit des tableaux de Vermeer, mais -malheureusement- sans la lumière! La mise en scène statique et conventionnelle ne m'a pas dérangée: quand la musique est belle, je me dis parfois que les chanteurs pourraient venir tour à tour à l'avant-scène pour interpréter leurs airs, et que je serais comblée quand même.

Côté narratif, l'opéra de Gluck raconte un épisode de la légende des Atrides, famille maudite de Mycènes dans la mythologie grecque. Exilée en Tauride par un terrible engrenage de meurtres, de vengeances et de sacrifices (les flashbacks sur cette saga constituent d'ailleurs une partie importante de la trame narrative), Iphigénie est un jour tenue de sacrifier aux dieux deux étrangers capturés par les Scythes: elle se rend compte que l'un d'eux est son frère Oreste, qui la croyait morte. Diane vient finalement empêcher le sacrifice et apaiser les âmes tourmentées.

Un peu loin de nous, tout ça, mais on y croit, et à certains moments, les larmes ne sont pas loin: voilà le miracle de l'art et de la création.

14/11/2010

Donizettite aiguë

troisDonPasquale.jpgEn moins d'une semaine, j'ai vu deux opéras de Gaetano Donizetti! Dimanche dernier,  L'elisir d'amore en version concert à la salle Pierrette-Gaudreault dans le cadre d'une tournée des Jeunesses musicales. Et hier, samedi 13

polenzaniPasq.jpg

Matthew Polenzani

novembre, Don Pasquale, diffusé en direct du Metropolitan Opera au Cinéma Jonquière.

Le bel canto, j'adore, mais à petites doses et à condition qu'il soit impeccablement rendu. Or, aucun des interprètes vus au Met hier n'en est spécialiste. Ce qui a donné: un premier acte ennuyant et mal chanté, un troisième et dernier acte mieux chanté mais assez peu distrayant.

Et un acte deux plutôt réussi, offrant d'excellents moments d'opéra comique: beaux airs à plusieurs voix, revirements et bouffonneries, amusante déconfiture du vieux Don PasnetrebkoDon.jpgquale quand la timide jeune femme qu'il vient d'épouser se métamorphose en mégère.

J'ai découvert et fort apprécié le talent comique d'Anna Netrebko (Norina) que j'ai vue dans d'autres opéras du Met (Roméo et Juliette, Lucia di Lammermoor), la vraie vedette de cette production, que je ne connaissais pas sous ce jour. Sa voix est plutôt belle, les aigus bien contrôlés, mais c'est une voix passe-partout, qui manque de personnalité je dirais. Ceci dit, elle joue délicieusement la comédie, et chante en courant, en sautant sur le lit, en faisant des pirouettes: chapeau!!!

La voix que j'ai préférée est celle du ténor Matthew Polenzani (Ernesto), tout à fait adaptée au bel canto, claire, pure dans le registre élevé, bien que manquant un peu de volume.

Le baryton-basse John Del Carlo, l'interprète de Don Pasquale, est excellent comédien, possède une bonne technique, mais il chante vraiment mal.

La prestation du maestro James Levine (photo) fut, comme toujours, délicieuse et sensible. En plus il semblait s'amuser beaucoup à diriger cette oeuvre légère qu'il abordait pour la première fois en 40 ans de carrière au Met.

Étonnant qu'avec tous les moyens financiers dont on dispose là-bas (le public est cependant sollicité pendant les entractes levinauMet.jpgpour faire des dons au Met!!!), avec ces gigantesques décors mobiles, cette débauche quasi indécente de couleurs, de costumes et d'accessoires, on ne réussisse pas à faire mieux. C'est sans doute à cause de l'intrigue, qui n'enrichit pas l'esprit en exposant comment des jeunes gens se moquent d'un vieux barbon qui souhaite épouser une femme belle et beaucoup plus jeune que lui. La morale, telle que chantée dans le finale, à savoir qu'un vieil homme ne devrait pas se marier, est d'une rare vacuité.

Publications sur cette production:

Sur cette page, des liens vers des critiques en anglais, fort élogieuses pour la plupart

Réflexion pertinente de Jack sur son blogue

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Pour ce qui est de L'Élixir d'amour, on pourrait faire la même réflexion: le thème est mince et sans profondeur, prétexte à une suite d'airs mélodieux. L'oeuvre a cependant plus de charme et  le scénario pétille davantage (que celui de Don Pasquale). Production montée avec deselisirAffiche.jpg moyens qui n'ont rien à voir avec ceux du Met, décor minimaliste, mise en scène bien sage et trop peu nuancée. Les jeunes interprètes, soutenus par un excellent pianiste (Maika'i Nash, originaire d'Hawaii), ont mis à contribution leur solide formation de base pour livrer le tout avec un enthousiasme qui faisait un peu oublier leur manque d'expérience.

02/05/2010

Armida: charme et trémolos

duoFleming,jpg.jpgArmida: un autre plaisir d'opéra. Un peu moins de monde que d'habitude, samedi après-midi au cinéma Jonquière pour la projection en direct du Metropolitan Opera, peut-être le beau temps a-t-il fait concurrence à l'opéra, mais personnellement j'ai passé des heures délicieuses.
Je ne connaissais pas cette oeuvre de Rossini, assez rarement jouée, c'est la première fois qu'elle est montée au Met.

La magnifique et toujours belle Renée Fleming aborde ce rôle périlleux avec grâce et assurance, ornementant son bel canto avec une virtuosité éblouissante.

Elle est entourée de cinq ténors, notamment du  bien nommé Lawrence Brownlee (que l'on verrait mieux dans le camp des maures que dans celui des chrétiens... mais enfin), qui joue Rinaldo, celui qu'elle ensorcelle et qui finalement la quitte. Belle voix également du ténor Barry Banks, dans ses deux rôles.

Cette incessante cascade d'exploits vocaux et de mélodies sublimes produit sur moi le même effet que le chocolat:  délicieux mais tellement riche que j'avais parfois un sentiment de satiété... et ça continuait quand même... Du bel canto pur sucre.
La magicienne Armida entraîne Rinaldo, le chef nouvellement élu des croisés dans un palais enchanteur et le tient sous son charme grâce à sa sorcellerie. Un sujet classique, pourrait-on dire. Et comme Ulysse et bien d'autres, Rinaldo finit par quitter celle qu'il aime pourtant pour vaquer à ses occupations d'homme: combat, guerre, le travail quoi!

Un ballet fabuleux au deuxième acte. Chapeau à la chorégraphe Graciela Daniele et aux danseurs et danseuses.

fleursArmida.jpg

 

Décors assez ordinaires, costumes couci-couça: certains, comme ceux des démons à la manière de Cats, frisent le ridicule. D'ailleurs la wagnérienne Debora Voigt qui remplaçait Renée Fleming (occupée ailleurs!) à l'animation, interviewant le chef de ces démons, n'a pu s'empêcher de dire qu'il portait le plus bizarre (weirdest -et je crois qu'elle voulait dire le plus laid-) costume jamais vu à l'opéra.

Mise en scène un peu confuse de Mary Zimmerman, qui on dirait, ne sait pas trop sur quel pied danser. Toute l'histoire est présentée sur un mode légèrement ironique, accentué par le sourire narquois qui ne quitte presque pas le visage de Mme Fleming. Pas de véritable émotion, donc, comme si tout ça n'était pas sérieux.

Mais comment pourrait-on être dans le drame quand les chanteurs virtuoses s'affrontent en duel -ou plutôt en duo- à coups d'ornements, fioritures, vocalises, arpèges, trilles, roulades et autres trémolos, tous plus étourdissants les uns que les autres?
On savoure, voilà, on savoure la musique, le temps passe vite, on en sort joyeux.
Les critiques ont été plutôt sévères envers cette production (ils ont même attaqué la prestation de Renée Fleming), mais comme vous le savez certainement, il ne faut jamais croire les critiques...

Cliquez ici pour lire l'opinion (très crédible celle-là!) de Jack.

07/02/2010

Placido Domingo: le doge idéal

simonPlacido.jpgVu l'opéra Simon Boccanegra, de Verdi, en direct du Metropolitan Opera: un bon petit groupe de spectateurs, mais le cinéma Jonquière n'était pas plein.
Placido Domingo, impressionnant. Il incarne le premier doge de Gênes Simon Boccanegra, un rôle de baryton pour lequel il possède le physique, même si sa voix, cela s'entend, demeure celle d'un ténor. A 69 ans tout juste sonnés, Il réalise un rêve qu'il a depuis longtemps, celui de chanter ce rôle, et c'est un grand parmi les grands. gVerdi.jpgStature, prestance, voix, on est tous en admiration, sinon en adoration devant ce grand artiste et ce grand Monsieur.

Né à Madrid, il a suivi ses parents (il avait dix ans) à Mexico, où il a grandi et étudié. À ses débuts aux États-Unis, il était donc "the kid from Mexico", comme il le racontait en entrevue avec Renee Fleming.

Avec James Levine au pupitre, c'est le "dream team". Je ne connaissais pas cet opéra, je l'ai beaucoup aimé,  même si la mise en scène est ultra-convenue. Cette musique de Verdi est sublime. L'histoire concerne cette fois un père et sa fille, sur fond de complot politique et de réalité historique, c'est fort intéressant. Et oui, le héros meurt à la fin!

Le ténor Marcello Giordani, que je n'aime pas beaucoup JamesLevine.jpghabituellement, a bien fait, cette fois, et la soprano canadienne Adrianne Pieczonka est très bonne, vocalement et scéniquement.
Elle donnait justement une interview à Sylvia L'Écuyer d'Espace Musique (que j'écoutais sur mon iPod pendant le premier entracte). Elle parle français (avec un accent), elle est dynamique, fort sympathique. Quand l'animatrice lui demande quel est son point de vue sur la retransmission en HD,  la soprano répond qu'en apprenant cela, elle a fait immédiatement le projet de maigrir. "Je voulais perdre "20 poids", a-t-elle répété plusieurs fois, traduisant ainsi l'anglais "20 pounds". Tout à fait charmant.
trioPlusGrand.jpgLes décors sont imposants. À l'entracte, on a vu un ensemble complet à deux étages (jardin, balcon de pierre, arbres, escaliers, rambarde) sortir de scène d'un seul tenant sur une plate-forme roulante, pour être remplacé par un autre décor complet, la salle du conseil avec ses marbres, ses vitraux, son trône, ses sièges et ...ses personnages, le Doge de Gênes et sa cour, tous les chanteurs déjà en place, qui se laissaient déménager sur ces roulements à bille.

Les costumes sont magnifiques, riches, opulents. Broderies, soieries, brocarts, cuir et pierres précieuses. Les hommes portent de superbes étoles en fourrure, et je me suis demandé si c'était de la vraie fourrrure. J'ai posé la question à des amis rencontrés sur adrianneMarcello.jpgplace, ils sont sûrs que c'est du faux, mais il faudrait voir, je n'en suis pas si sûre.

Bref, j'ai passé un après-midi absolument superbe, plongée dans la musique, dans un spectacle qui m'a rendue complètement heureuse. Heureuse malgré (ou à cause de) ce triste constat, au moment où Simon Boccanegra, empoisonné, se meurt:

D'interminato pianto fonte è l'umano cor

 

que l'on pourrait traduire ainsi:


Le coeur humain, source de larmes intarissable